Intervention de Patrick WOTLING (Professeur à l’Université de Reims), mercredi 9 octobre 2019 de 18h30 à 20h.

En réfléchissant au sens exact de la démarche nietzschéenne, le lecteur ne peut qu’être frappé par deux constatations curieuses qui finissent par s’imposer à sa réflexion : Nietzsche affirme avec force que son ambition n’est nullement négative ; et que de ce fait, la critique, en particulier sous les espèces de la réfutation de ses prédécesseurs, n’est en rien son objectif : « que m’importent les réfutations ! » (Éléments pour la généalogie de la morale, Préface, § 4).
Or, cela n’a nullement empêché le commentarisme d’interpréter largement la réflexion nietzschéenne dans le sens d’une intervention hypercritique, récusatrice, rectificatrice. Et ce en dépit des dénégations non seulement explicites, mais surtout répétées de Nietzsche, qui attribue au contraire au philosophe un rôle fondamentalement positif. Pourquoi, alors, cet oubli si général de la partie constructive de la tâche nietzschéenne chez les commentateurs ? Et surtout, où et comment cette dernière se manifeste-t-elle ?

En outre - difficulté supplémentaire -, il faut reconnaître que Nietzsche ne se prive apparemment pas de pratiquer cette critique des prédécesseurs qu’il affirme dans le même temps considérer comme accessoire. Cette situation d’allure paradoxale n’aurait-elle pas précisément pour fonction de fournir un indice sur la nature de la démarche qu’il entreprend ? La présente conférence se proposera de mettre à l’épreuve cette indication pour déceler la logique, et les principales étapes, de la reconstruction de l’enquête philosophique telle que Nietzsche la repense.