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Séminaire Jeunes Chercheurs de Philosophie Argumentative | Philosophie de l'art & Philosophie du droit

Publié le 19 mai 2025 Mis à jour le 6 juin 2025

Intervention de Diego MIONE (Université Jean Moulin Lyon 3), jeudi 12 juin, dans le cadre du séminaire Jeunes Chercheurs de Philosophie Argumentative.

Séance 9 : Philosophie de l'art & Philosophie du droit

Diego Mione (Université Jean Moulin Lyon 3) :

"Liberté de création artistique : entre expression esthétique et normes juridiques"

Résumé :
La liberté de création est au cœur des débats contemporains sur les tensions entre la liberté d'expression et les pratiques artistiques publiques. Ce projet se propose d’examiner cette notion en croisant la philosophie de l’art et du droit. L'objectif est de mieux comprendre les spécificités de l’art comme forme d’expression d’une part, et d’autre part, de déterminer s’il peut s’affranchir des limites légales ou, au contraire, s’il doit s’y soumettre, et discuter alors des justifications de ces restrictions.

Une première partie de l’étude peut se concentrer sur la nature de la création artistique elle-même, en questionnant ce qu'implique une liberté absolue dans ce domaine. Les syntagmes « liberté d’expression artistique » [1] et « liberté de création » [2] sont désormais régulièrement mobilisés, attestant l’importance croissante que leur accorde le législateur et le juge. Toutefois, parce qu’on peine à saisir le sens et la portée que l’on devrait donner à ces expressions, on soupçonne qu’une telle intronisation dans le droit ne soit véritablement qu’honorifique [3]. En nous appuyant sur les théories esthétiques contemporaines (en particulier celles qui sont issues de l’esthétique analytique [4]), nous tenterons donc d’explorer le sens et le contenu de la notion de « liberté créatrice » en tant qu’expression subjective et autonome En quoi l’art se distingue- t-il de la simple communication ou de l’expression d’opinions ?

L’étude pourra se poursuivre en abordant les contraintes légales imposées à la création artistique. En nous appuyant sur la philosophie du droit, il s’agira de questionner la nécessité ainsi que la légitimité des restrictions de la liberté de création artistique et de déterminer dans quelle mesure elles constituent une entrave favorable ou abusive de la liberté d’expression artistique. Est-il juste, compte tenu des spécificités de l’expression artistique, que les limites entourant la liberté d’expression, reconnues au nom de justifications qui lui sont propres (conflit avec des libertés concurrentes, respect des valeurs démocratiques, etc.), soient appliquées à l’expression artistique, ou au contraire, ne conviendrait-il pas de favoriser une approche plus permissive ?

À terme, ce travail ambitionnera de dégager des pistes de réflexions plus pragmatiques, en envisageant des manières concrètes de réguler la liberté de création. En mobilisant la théorie du harm principle de Mill par exemple, ou les concepts contemporains de la démocratie délibérative, il doit être possible d’interroger la balance entre la protection des sensibilités individuelles et la préservation d’un espace public où l’art, même provocateur ou transgressif, peut jouer un rôle critique dans le débat social. Est-il possible d’établir un cadre normatif souple qui, tout en permettant une expression artistique diversifiée, maintienne des limites claires et légitimes ?

[1] CEDH, « Müller c. Suisse », no 65275/19, 2002
[2] « LOI n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (1) », dans 2016-925, 2016
[3] MONTAS ARNAUD, « Le juge et la liberté de création artistique », Les Cahiers de la Justice, N° 4, no 4, 2018, p. 735
[4] Les auteurs issus de cette tradition, tels que Georges Dickie, Nelson Goodman ou encore Arthur Danto, mais également la réception francophone de leurs travaux, chez Carole Talon-Hugon ou Alain Séguy-Duclot par exemple, ont permis de surmonter certains obstacles théoriques nés de la révolution artistique qu’a représenté l’art contemporain au cours du XXe siècle. Ce corpus, par conséquent, a permis de réactualiser le champ de l’ontologie de l’art (ce qui nous intéressera pour comprendre les caractéristiques de l’expression artistique), mais également de l’axiologie (discutant de manière critique l’héritage romantique de l’autonomisme moral en art, doctrine justifiant pour beaucoup l’idée qu’une liberté d’expression étendue voire spécifique aux pratiques artistiques devrait leur être accordée).

 
► Lien de connexion :
https://univlyon3.webex.com/univlyon3/j.php?MTID=mfb9ab7d452ce02adad5810187053a501

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