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Séminaire Jeunes Chercheurs de Philosophie Argumentative | Épistémologie et philosophie des sciences

Publié le 7 mai 2024 Mis à jour le 7 mai 2024

Interventions de Antoine BRANDELET (Université de Mons) et de Faustine OLIVA (Aix-Marseille Université) dans le cadre du séminaire Jeunes Chercheurs de Philosophie Argumentative. Rendez-vous mardi 14 mai 2024 à 17h.

Séance 8 : Épistémologie et philosophie des sciences

 
Antoine Brandelet (Université de Mons) : "La conception fictionnelle des modèles face au problème de l'explication : ontologique ou épistémique ?"

Dans mon travail de recherche, je m’intéresse à l’épistémologie des modèles et particulièrement à la conception fictionnelle des modèles dans le cadre des débats à propos du réalisme scientifique.
Le débat contemporain entre réalisme et antiréalisme scientifique se structure généralement autour d’un questionnement sur la continuité historique : l’existence de changements théoriques radicaux ou de paradigm shifts kuhniens permet de formuler une méta-induction pessimiste souvent perçue comme un argument très fort à l’encontre de la position réaliste. L’une des stratégies réalistes pour résister à ce gambit historique consiste à rétablir une forme de continuité. C’est par exemple le cas du réalisme structural, qui admet des changements conceptuels en physique, mais insiste sur les régularités dans les lois et les théories au fur et à mesure de leurs remplacements successifs.

Ces dernières années, la question de la représentation scientifique a attiré l’attention de nombreux philosophes et a fait l’objet de nombreuses discussions (voir par exemple le recueil d’articles édité par Mauricio Suárez : Fictions in science: philosophical essays on modeling and idealization, Routledge, 2009 ). De nombreuses conceptions s’opposent sur différents points d’analyse, mais la problématique s’articule généralement autour de la notion de modèle et de sa relation avec les théories scientifiques. La question centrale est donc : qu’est-ce qui fait qu’un modèle représente effectivement le système physique étudié (appelé système cible) ?
On pourrait réunir les conceptions à propos des pratiques de modélisation en sciences en deux grandes catégories : naturalistes et pragmatiques. Les premières tentent d’expliquer le fonctionnement et l’utilité épistémique des modèles en se fondant sur une relation entre le modèle et la cible : la représentation est couronnée de succès en vertu d’une ressemblance, d’une similarité, d’un isomorphisme. Les conceptions pragmatiques mettent en avant l’impossibilité de réduire la représentation scientifique à une relation binaire. Pour comprendre l’utilité et l’usage des modèles, il faudrait prendre en compte l’intentionnalité du modélisateur, les normes d’acceptation ou de scientificité de la communauté.

Du point de vue du réalisme, il semble que la première catégorie soit préférable. En effet, si la représentation scientifique est une relation qui fait appel au sujet, même en imaginant qu’une notion analogue à celle de vérité (par exemple de véridicalité des modèles) puisse être définie, elle ne pourra pas être comprise comme ayant une valeur uniquement déterminée par “la réalité extérieure”. La thèse du réalisme sémantique s’en trouve mise à mal.
Parmi les conceptions défendues, l’une repose sur une similitude entre le raisonnement à base de modèles et les œuvres de fiction. Cette vision fictionnelle des modèles fonde son analyse sur le concept de make-believe de Walton. Selon ses défenseurs, l’attitude du scientifique lorsqu’il utilise un modèle pour représenter un système physique est la même que lorsque nous sommes confrontés à une œuvre de fiction : nous faisons semblant de croire ce que le modèle décrit, même si nous savons que des approximations, des idéalisations ou des fictions y sont intégrées.
Cette conception pose des questions à la fois sur la capacité explicative des modèles et sur leur ontologie, et le réalisme se trouve à nouveau, du moins en apparence, en mauvaise posture. Peut-on dès lors encore croire à l’existence des objets décrits par la physique ? Ou assiste-t-on à une dissolution générale des concepts physiques en de pures fictions ?

Lors de ce séminaire, j’aborderai d’une part les conséquences d’une telle conception fictionnelle sur le réalisme scientifique et, d’autre part, j’examinerai comment la notion de fiction permet d’articuler les différents arguments que s’opposent les conceptions épistémique et ontologique de l’explication scientifique.

Faustine Oliva (Aix-Marseille Université) : "Que font les assistants de preuve aux mathématiques ? Présentation de quelques questions que posent les démonstrations assistées par ordinateur à la philosophie des mathématiques"

Un assistant de preuve permet, entre autres, d’écrire un raisonnement mathématique dans un langage de programmation et de le vérifier en produisant une certification du programme obtenu. C’est un logiciel interactif fondé sur un système logique qui guide et contrôle le déroulement de la démonstration qu’écrit l’utilisateur. Il lui indique ses erreurs et ses manquements. Il peut en outre prendre en charge la conduite de certaines étapes du raisonnement de manière automatique. Si les usages des assistants de preuve ne se limitent pas au domaine des mathématiques les possibilités qu’ils offrent dans cette discipline ont contribué à l’émergence de nouvelles pratiques et à l’essor de démonstrations d’un nouveau type : les démonstrations assistées par ordinateur. Ce terme revêt deux sens. Il désigne, d’un côté, une démonstration dont la validité repose sur le résultat de l’exécution d’un programme localisé à un endroit particulier. D’un autre côté une démonstration assistée par ordinateur est une formalisation, dans l’environnement d’un assistant de preuve, d’une démonstration mathématique sous la forme d’un programme informatique dont le bon typage atteste de la validité. L’irruption des assistants de preuve et des démonstrations assistées par ordinateur dans le paysage mathématique contemporain génère de nouvelles interrogations pour la philosophie des mathématiques tout en introduisant une nouvelle perspective pour traiter de questionnements plus traditionnels.
    
Le but de cet exposé est de présenter quelques-unes de ces questions afin de mettre en évidence l’intérêt pour le philosophe d’intégrer l’étude des assistants de preuve à sa réflexion sur les mathématiques. Nous nous concentrerons sur l'épistémologie des mathématiques : nous nous intéresserons à la notion de justification en nous demandant quel type de justification est propre aux mathématiques et en quoi la notion de démonstration assistée par ordinateur nous éclaire sur les spécificités de la preuve mathématique.
    
Pour mener à bien cette présentation nous nous baserons sur une étude du système Coq. Développé par l’Inria à partir des années 80 Coq fait partie des assistants de preuve les plus connus et les plus influents. Après avoir brièvement présenté son fonctionnement nous aborderons les différentes questions évoquées ci-dessus en nous appuyant sur plusieurs exemples de démonstration.


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