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SAUZET Romain

La pluralité scientifique en action – le cas du LabEx IMU

Publié le 25 avril 2017 Mis à jour le 16 décembre 2019

Thèse en Philosophie – Étude des Systèmes, soutenue le 24 avril 2017.

À partir d'une analyse de la science contemporaine comme état de pluralité scientifique, nous nous intéressons à la situation épistémologique particulière qu'est la mise en œuvre de cet état de pluralité, c'est-à-dire à la pluralité scientifique en action, sous la forme de projets de relations entre disciplines scientifiques distinctes. Nous définissons la relation disciplinaire comme une relation d'interaction volontaire entre différents chercheurs issus de disciplines et/ou de spécialités différentes, autour d'un problème commun, pour lequel leurs compétences épistémiques spécifiques sont requises. Dans ce but, nous associons une réflexion théorique à l'étude d'un terrain propice : le LabEx IMU (Laboratoire d'Excellence de l'Intelligence des Mondes Urbains) et les projets scientifiques qui émergent en son sein, à partir de disciplines aussi distinctes que les sciences informatiques, l'archéologie, la biologie, sociologie, philosophie, etc. L'étude de pluralité scientifique en action veut également dire : telle que la pluralité scientifique est pratiquée. Notre objectif est de mobiliser les ressources philosophiques ( philosophie des sciences générale, pragmatisme, épistémologie sociale, philosophie empirique) pour rendre compte de la dimension proprement épistémique de ces projets, c'est-à-dire leur objectif de connaissance.
Dans ce but, nous analysons le contexte de spécialisation disciplinaire dans lequel des situations d'interactions émergent, en considérant que bien que cette spécialisation soit le plus souvent justifiée épistémique, d'autres dynamiques scientifiques apparaissent comme nécessaires. Nous défendons la thèse suivante : ces interactions sont des réponses à la nécessaire tension à l'unité dans la science, tout en étant devant être considérées sur un plan épistémologique comme des tentatives de mise en ordre non théoriques, qui anticiperaient ce que la science qui devrait être.
Pour préciser ce que sont les projets de relation disciplinaire, nous nous intéressons à la condition de la science qui les rend possible (division du travail scientifique ; communauté scientifique), ainsi qu'aux moyens d'instruire philosophiquement de telles situations, en mobilisant la notion d'enquête chez les philosophes Peirce et Dewey, notamment dans le lien qu'elle permet entre sens commun et enquête scientifique. À l'encontre de plusieurs approches de l'interdisciplinarité, qui cherchent à définir un niveau d'interaction satisfaisant, nous proposons de rendre compte de la multiplicité des interactions épistémiques au sein de la science et de développer des moyens d'analyse susceptible de représenter ces situations. Dans ce but, nous revalorisons la place des disciplines, afin de justifier le fait que ces projets sont principalement la poursuite d'une science normale par d'autres moyens. Nous analysons également en quoi ces projets doivent être considérées comme une bonne manière de faire de la science, fondés en premier lieu par leur excellence épistémique. D'autres valorisation deviennent alors possibles : comme commensurabilité aux phénomènes, comme confrontation à des problèmes pratiques et comme maximisation de la culture et des valeurs scientifiques.
En confrontant ces analyses à notre terrain d'étude, nous développons des catégories analytiques susceptibles de représenter les situations d'interactions, en proposant une typologie des relations disciplinaires ainsi qu'une étude plus globale des projets de relations disciplinaires en eux-mêmes. Nous terminons notre étude par l'analyse de différents projets du LabEx IMU, en leur appliquant les catégories de représentation précédemment développées.

Starting from an analysis of contemporary science as a state of scientific plurality, this thesis studies the epistemological issues that arises from the implementation of this state of plurality, that is to say scientific plurality in action, as it takes form in projects of relationships between distinct scientific disciplines. Defining the concept of disciplinary relationship as a voluntary relation of interaction between different researchers from different scientific disciplines around a common issue, for which their specific epistemic competences are required. To this end, the thesis brings together theoretical reflection and fieldwork : the study of the Labex IMU - (Laboratoire d'Excellence: l'Intelligence des Mondes Urbains ; Laboratory of Excellence: Intelligence of Urban Worlds) within which scientific projects emerge from disciplines as different as computer science, archeology, biology, sociology, philosophy, etc. The study of the scientific plurality in action thus means the study of scientific plurality as practised. The objective of the study is to use philosophical resources (general philosophy of science, pragmatism, social epistemology, empirical philosophy) to describe the epistemic dimension of these projects, that is to say their objective of acquiring knowledge.
With this objective in mind, the thesis analyses the origin of this state of diversity by considering the problem of disicplinary specialization, showing that, even if these specializations are for the most part justified, other disciplinary dynamics and relations are also necessary. This leads to the defence of the following thesis : these interactions are answers to the necessary tension toward the unity of science and they must be considered from an epistemological point of view as non-theoretical attempts anticipate what the science should be.
To specify the projects of disciplinary relationships, the thesis studies first the scientific conditions that makes them possible (scientific division of labour, the scientific community). This requires the philosophical analysis of such situations, which is undertaken via consideration of the notion of inquiry, as analyzed by the philosophers Peirce and Dewey, and in particular the link that it establishes between common sense and scientific inquiry. In opposition to various interdisciplinarity approaches, which seek to define a satisfactory level of interaction, the thesis instead investigates the multiplicity of epistemic interactions present in science so as to develop analytical means to represent such situations. A greater status is thus accorded to individual disciplines, which in turn justifies the idea that these projects are a mere continuation of normal science by other means. The thesis also analyses also how these projects must be considered as good science, founded in the first place in epistemic excellence. Other ways of valorizing are also discussed : as commensurability to phenomena, as confrontation to practical issues, and as the promotion of scientific culture and values.
By confronting these analyses with fieldwork, analytical categories are developed which are capable of representing diverse situations of interactions, notably through the proposition of a typology of disciplinary relationships, as well as a more globlal study of the disciplinary relationships manifested in individual projects. The thesis concludes with an analysis of several projects of the LabEx IMU, considered in the light of the representational categories previously developed.

Mots-clés :
Relation disciplinaire ; interdisciplinarité : relation épistémique ; philosophie des sciences ; épistémologie ; philosophie empirique ; pluralité de la science ; unité de la science ; valeurs épistémiques.

Keywords :
disciplinary relationship ; interdisciplinarity ; epistemic relationship ; philosophy of science ; epistemology ; empirical philosophy ; scientific plurality ; unity of science ; epistemic values

Directeur de thèse : M. Thierry HOQUET
 
Membres du jury :
Mme Anouk BARBEROUSSE, Rapporteur, Professeure des universités, Université Paris Sorbonne,
M. Thierry HOQUET, Professeur des universités, Université Paris Nanterre,
M. Jean-Philippe PIERRON, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3,
Mme Olga POMBO, Professora Doutora, Universidade de Lisboa (Portugal),
Mme Stéphanie RUPHY, Rapporteur, Professeure des universités, Université Grenoble Alpes,
M. Jean-Yves TOUSSAINT, Professeur des universités, CNRS, INSA Lyon.

Président du jury : M. Jean-Philippe PIERRON

Equipe d'accueil : Équipe Louis Josserand
 
Décision : Admis