"Le sensorium dei et la métaphysique de l’espace : la controverse Leibniz-Clarke" : Conférence publique organisée par la Société Rhodanienne de Philosophie

La conférence cherchera d’abord à éclairer le contexte dans lequel Newton élabore la fameuse métaphore des Queries selon laquelle l'espace est comme le sensorium dans lequel Dieu perçoit et agit sur les corps, capable ainsi par sa seule présence de maintenir les planètes sur leurs orbites et de réformer périodiquement le système du monde.
Elle défendra l'idée que le sensorium dei, qui fut sévèrement critiqué par Leibniz dans sa correspondance avec Clarke, est un identifiant fort de la métaphysique newtonienne. La métaphore est solidaire d'une représentation ontologique originale (exprimée notamment dans le De Gravitatione) qui constitue l'espace comme "affection" ou effet émanant de l'existence divine, plutôt que comme propriété essentielle de Dieu, ou être suo modo et incréé. Cette position situe donc Newton à égale distance de More et de Gassendi (deux auteurs desquels on le rapproche ordinairement), et elle est étroitement solidaire de l'attitude théologique qui s'exprime notamment dans le Scolie Général des Principia, affirmant l'absolue souveraineté de Dieu sur sa création.

La conférence montrera ensuite que la notion de sensorium est elle-même élaborée par Newton dans le contexte d'une théorie de la vision cérébraliste et représentationaliste – elle révèle que, dans les contextes apparemment hétérogènes de l'optique et de la théologie naturelle, les mêmes principes constitutifs sont à l'œuvre et notamment une conception présentiste de la causalité, la reconnaissance de l'influence physique contre toute solution harmonique au problème de l'union de l'âme et du corps, et d'une certaine coextensivité de l'esprit et du corps.