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Journée d'étude | Écrans, transparence, populismes

Publié le 30 avril 2019 Mis à jour le 7 mai 2019

Journée d'étude sous la direction de Jacopo Bodini et Mauro Carbone. Avec le soutien du Projet Bourgeon 2019.

Argumentaire

Les mutations qui investissent à présent les écrans numériques visent à produire une impression toujours croissante d’« immédiateté », paradoxalement obtenue à travers un emploi massif de médiations technologiques (Bolter & Grusin, Pinotti). Cette impression d’immédiateté est souvent sous-tendue par une sorte d’« idéologie de la transparence », à comprendre comme la prétendue absence de toute médiation. Autrement dit, un tel effet idéologique serait produit, encore une fois, à travers une dissimulation de la médiation et de sa technologie (McLuhan, Baudry). Contrairement à son étymologie, évoquant littéralement un médium à travers (trans-) lequel l’apparaître advient, la transparence serait donc comprise en tant que transparence absolue.

Par ailleurs, toujours plus souvent les opportunités médiatiques et télématiques ouvertes par la révolution numérique sont évoquées et invoquées comme un antidote efficace aux pratiques, jugées « opaques », des élites (Alloa & Citton). En même temps, la transparence comprise comme prétendue absence de toute médiation semble désormais être une composante idéologique cruciale, non seulement des stratégies de communication des populismes politiques contemporains (lesquelles sont pourtant souvent basées sur la diffusion de fake news), mais aussi de leur critique de la démocratie représentative, comprise justement en tant que système fondé sur des médiations (séparation des pouvoirs législatif, exécutif, judiciaire ; action autonome de corps intermédiaires comme les partis politiques, les syndicats, les groupes de pression, la presse, etc.) qui opéreraient de manière précisément opaque entre l’individu et le pouvoir politique.

Existe-t-il alors une convergence structurelle entre l’« idéologie de la transparence 2.0 » (Carbone) qui gouverne les écrans contemporains et celle des populismes politiques actuels, où l’une et l’autre se caractériseraient fondamentalement comme ignorance (involontaire ou délibérée) des médiations ? Et si c’est bien le cas, et si Régis Debray pouvait écrire que « la servitude, c’est le renversement par l’homme du médiatisé en immédiat », peut-on recourir à la notion de « servitude volontaire », élaborée par Étienne de La Boétie au XVIème siècle, pour expliquer la tendance actuelle à se livrer volontairement à une sorte de « panoptique digital » (Han) incarnant une forme inédite d’absolutisme visuel et politique ?

Cette Journée d’étude vise justement à interroger les présupposés médialogiques, les implications philosophiques et les conséquences politiques d’un tel nœud de relations.


Programme

  • 9h : Salutations
  • 9h15 : Jacopo Bodini (Université Jean Moulin Lyon 3) – Mauro Carbone (Université Jean Moulin Lyon 3), "Introduction : L’intériorisation des écrans et son idéologie"
  • 10h : Yves Citton (Université Paris 8 Vincennes – Saint Denis), "Reductio ad ecranum ?"
  • 10h45 Pause café
  • 11h : Graziano Lingua (Università di Torino), "Les malentendus de la transparence et les frontières de la désintermédiation politique"
  • 11h45 : Luca De Biase (IULM, Milano), "Le couteau, le peuple et la médiation"
     
  • 12h30 - 14h :  Pause déjeuner
     
  • 14h : Federico Leoni (Università di Verona), "Du désir d’avoir un maître"
  • 14h45 : Eric Fourneret (Université Grenoble Alpes), "Les technologies d’information et de communication conduisent-elles vers une société sans sujet ?"
  • 15h30 : Pause café
  • 15h45 : Philippe Poirier (Université du Luxembourg), "Démocratie rédemptrice versus démocratie représentative au regard de l’expérience de la France Insoumise en France, de Cinque Stelle en Italie et du Forum voor Democratie aux Pays-Bas"
  • 16h30 : Gilles Gressani (Collège de Bernardin, Università di Torino, Université du Luxembourg), "Sur le style populiste du Mouvement Cinq Étoiles : usages, techniques et imaginaires numériques"
  • 17h15 : Table ronde conclusive animée par Jacopo Bodini (Université Jean Moulin) et Anna Caterina Dalmasso (Université Saint-Louis, Bruxelles)
Contact :
Partenaires :
Faculté de Philosophie de l'Université Jean Moulin Lyon 3
Institut de Recherches Philosophiques de Lyon (IRPhiL)
Thématiques :
Philosophie; Recherche